Texte de Leslie Kaplan (Editions POL I 2013)
"L’amour, la fin de l’amour, la peur et le désir de l’amour, voilà ce qu’explore le nouveau texte poétique, comique et politique de Leslie Kaplan. Comment penser sa vie dans un monde sans cesse envahi par la bêtise agressive, le repli sur soi, la crainte de l’inconnu, et comment rêver non pour fuir le monde mais pour le transformer.
Déplace le ciel est une pièce sur l’amour, la recherche de l’amour, sur la solitude et sur le monde dans lequel nous vivons, et où nous sommes confrontés à une pensée faite de clichés, une pensée télé, c’est une pièce sur la difficulté de dire son expérience sans la rabattre sur des idées reçues et du savoir acquis, c’est une pièce sur le désir de découverte, de nouveau, de départ et de changement, c’est une pièce sur les rêves et le rêve.
Il s’agit de deux femmes qui se confrontent à l’absence d’un être aimé, à une séparation qui a dû être douloureuse, qui s’y prennent de façon différente, voire antagoniste, qui évoquent l’être aimé en rêve ou en hallucination, s’adressent à lui, se débattent avec lui, et qui ce faisant traversent cette séparation et repartent dans la vie, le monde.
Il y a des tensions entre les deux femmes, mais il y a surtout du conflit en elles, leurs rêves et leurs hallucinations sont pleins de tensions.
Et elles passent de représentations dures, pénibles, anciennes (ou inventées), traumatiques, à des représentations ouvertes, de désir.
Le mouvement, c’est ça.
Et le contexte c’est l’époque, un moment où il y a une guerre entre fiction et naturalisme. Aujourd’hui la fiction est dévalorisée, ce qui tient le devant de la scène c’est le « direct », « l’actu », la télé, le « c’est vrai parce que c’est moi », « c’est vrai parce que je le dis », etc. L’accent est mis sur la valeur performative, publicitaire, des mots, le témoignage plat, le récit linéaire, le rêve fabriqué, artificiel, de la société de consommation.
Or, la fiction on y tient, parce que c’est le langage même, la polysémie, le jeu, l’infini des possibles, l’ouvert, le risque et le rêve… avec aussi bien sûr la possibilité du malentendu, de la trahison, etc. "
LESLIE KAPLAN
Adaptation, mise en scène et jeu
Elise Vigier et Frédérique Loliée
Décor Yves Bernard
Lumières Maryse Gautier et Yves Bernard
Son & musiques Teddy Degouys et Manu Léonard
Création vidéo Romain Tanguy
Collaboration vidéo et régie Quentin Vigier
Collaboration à l’écriture chorégraphique Brigitte Seth & Roser Montlló Guberna
Régie générale et plateau Camille Faure
Costumes Laurence Revillion
Régie lumière Jacques Guinet
Production LES LUCIOLES
Coproduction Théâtre de la Foudre - scène nationale de Petit Quevilly, Théâtre de Cavaillon – Scène Nationale, Comédie de Caen – CDN de Normandie
Avec le soutien du Centquatre-Paris et du Théâtre Gérard Philipe – CDN de Saint Denis.
Avec l’aide duDICRéAM
Entre réalité et rêve, lieu clos et soif d’ailleurs, quête d’amour et espérance nourricière, elles se débattent au milieu d’un poste de télévision intrusif et de murs froids qu’elles s’efforcent de dépasser, de franchir, de traverser. Ces deux femmes, dont on ne sait rien, ont quelque chose d’universel.
Comme le sont la recherche de l’amour, la solitude inévitable, le poids du réel, la soif de liberté, l’espoir indispensable. Tout cela prend vie grâce à la beauté légère des mots, à la drôlerie des situations et, redisons-le, au talent des comédiennes. Déplace le ciel est à voir, à entendre, à savourer. Même si, au bout du compte, on ne sait toujours pas où est ce fichu Léonard… LE JSD.COM I 2 décembre 2013
C’est la troisième fois que Leslie Kaplan écrit pour Frédérique Loliée et Elise Vigier. En 2007 les deux actrices avaient commandé une pièce à Leslie Kaplan et ce fut « Duetto-Toute ma vie j’ai été une femme ». Puis en 2011, second volet « Louise, elle est folle ». « Déplace le ciel » complète la trilogie.
On aimerait bien qu’un théâtre ait l’idée de leur proposer de jouer d’un coup la trilogie d’autant que les deux premiers volets ont été peu vus. Elles ont tellement de plaisir à être ensemble sur un plateau de théâtre. Et puis Leslie Kaplan a visiblement plaisir à écrire pour elles ces pièces légères comme l’air et drôles comme tout. « Les allers retours entre l’écriture et le travail de plateau sont pour moi extrêmement stimulants » confesse-t-elle. Et cela se voit. C’est dire la jubilation qu’on a à être assis devant elles, à les voir déplacer le ciel en faisant bouger les lignes écrites par leur amie.
RUE 89 I Jean-Pierre Thibaudat 4 décembre 2013
Deux femmes dans un bar ou dans tout autre lieu où elles peuvent se trouver à côté d’une télévision allumée. De laquelle s’échappent des propos ineptes. Les deux femmes font, elles, danser les mots, les soupèsent, les refont à neuf. Entre deux évocations d’un certain Léonard, objet d’amour et de haine de l’une d’elles, elles parlent de vaches, de singes, des théories de Darwin, de la difficulté d’être et aussi, exemples farfelus à l’appui, de la supériorité de la langue française sur l’anglais... Ce faisant, elles remettent en question des convictions toutes faites et de fil en aiguille osent le face à face avec notre époque. Epuisées par ces échanges souvent burlesques il leur arrive de sombrer dans le sommeil. Et de rêver. Ces rêves qui leur apparaissent évidement idiots ne sont pas sans les troubler. Elise Vigier et Frédérique Loliée, qui jouent et ont conçu la mise en scène, donnent une beauté inédite à ces moments qui offrent une opportunité à s’atteindre.
Leslie Kaplan a, à l’évidence inventé une nouvelle écriture scénique. Si son texte est d’une densité intimidante, il est aussi gorgé d’humour. D’un humour souvent âpre. Elle assène surtout la preuve que le théâtre est un champs où la pensée peut gambader, où elle a la liberté de se déployer.
ALLEGRO THEATRE I Joshka schidlow 3 décembre 2013